Lorsque vous évoquez une personne en recherche d’emploi, deux termes reviennent souvent : celui de “demandeur d’emploi” et celui de “chercheur d’emploi”. Ces deux appellations, en plus d’être désuètes, ont un impact important sur la posture d’un candidat.
Si les pouvoirs publics et les associations œuvrent depuis de nombreuses années à changer les regards (ou représentations) et les stéréotypes autour du handicap (ex : aveugle / mal-voyant), ce n’est pas le cas dans l’emploi. On parle bien plus souvent de “recherche d’emploi” que “d’offreur de compétences”.
Or, une bascule importante s’est opérée depuis une dizaine d’années. La relation entre le candidat et l’employeur n’est plus aussi unilatérale. Grosso-modo, il ne suffit plus à l’entreprise de déposer une offre et d’attendre qu’elle soit trouvée. Aujourd’hui, l’entreprise doit expliciter l’offre pour la diffuser mais aussi répondre à toutes sortes de sollicitations.
Ce “parcours candidat” qui fait actuellement les beaux jours de la marque employeur le démontre bien. Ce n’est plus “l’offre d’emploi” qui est au centre de l’attention mais bien le candidat qui postule. Ce renversement s’est opéré suite à la pénurie de certaines compétences et à l’émergence de ce qu’il faut bien appeler les “métiers en tension”.
Dans le même ordre d’idée, l’état et tous les acteurs qui gravitent autour de la formation (OPCO, Syndicat professionnel ou de branche…) au travers du CPF, souhaitent unifier les parcours de formation. En effet, exit le parcours de formation initiale d’un côté et le parcours de formation continue de l’autre, bienvenue au parcours de formation tout au long de la vie (PFTLV).
Si les appellations “changent ou évoluent” ce n’est pas juste pour un effet de mode mais bien pour agir sur les représentations. Il est plus heureux de parler de PFTLV (bon d’accord, encore un acronyme !) lorsque l’on souhaite impulser auprès des “stagiaires / salariés / offreurs de compétences” l’idée que, se former ne s’arrête pas aux portes de l’entreprise. Bref, que les changements d’emplois et remises en question personnelles et professionnelles nécessitent l’acquisition de nouvelles compétences tout au long de la vie.
Formé en psychologie du travail, j’avais déjà engagé il y a une quinzaine d’année cette réflexion à travers l’accompagnement des personnes en recherche d’emploi. Je trouvais que l’appellation “demandeur d’emploi” renvoyait à une démarche passive de la part des stagiaires au sein de mes groupes. Bien que l’appellation “chercheur d’emploi” puisse paraître plus “active” elle se centre davantage sur l’emploi que sur l’offre de compétences.
J’ai pu constater que cette vision était partagée par d’autres accompagnants.
Ainsi Sylvie Filipski coach professionnelle sur le blog de Perspeckives.fr questionne : Et si, pour bien employer les personnes, il s’agissait d’abord de bien employer les mots ?: Je cite : “Pour désigner les personnes en situation de chômage, on est certes déjà passé du terme de « chômeurs » à celui de « demandeurs d’emploi », c’est à dire de la vision de gens qui chôment, sous-entendu qui ne font rien puisqu’ils ne travaillent pas (est-ce vraiment le cas ?), à celle de gens qui sont en demande. Or, quand on est en demande de quelque chose, c’est par définition qu’il nous manque quelque chose qu’on aimerait bien avoir. L’intention est-elle vraiment de valoriser cette catégorie de personnes aux yeux de la société ? En tous cas, cette tournure induit directement la posture avec laquelle nos « candidats » à l’emploi (autre formule du même acabit) se pressent sur les bancs saturés de Pôle Emploi, et ça sent pas mal le déséquilibre. En effet, je constate qu’on ne parle pas pour les employeurs de « demandeurs de compétences »… C’est pourtant aussi la réalité. Pourquoi cette demande implicite n’est-elle pas mise en évidence dans notre langage ? Pendant quelques secondes, prenez donc le temps vous-mêmes de ressentir le regard que vous porteriez face à un « demandeur de compétences » plutôt qu’un employeur potentiel....
et Nicolas de Vicq de compléter : "Le domaine du travail est complètement chamboulé et le sera encore plus dans les années qui viennent. La cata pour certains, une formidable opportunité pour d’autres. Pour autant qu’ils sachent se vendre. Non pas en tant que «demandeurs d’emploi», mais bien comme «offreurs de compétences»."
J’avais ainsi proposé en 2002 (ça ne nous rajeunit pas !) le terme d'Off.Com pour Offreur de Compétences. Avec un double sens, le “Off-Com” signifiant celui qui n’est plus dans le réseau actif du travail, à l’inverse de “ON-COM” représentant celui qui est en poste ou en emploi.
Actuellement en charge d’aider à la mise relation les entreprises inclusives et les “talents fragiles” à travers le dispositif Fab’RH Savoie, je vous propose cette innovation sociale sémantique pour bouger les lignes et vos représentations afin que 2020 soit l’année des Off Com ! Si, comme moi, vous pensez que nous pouvons changer les représentations avec un simple mot, alors n’hésitez pas à Liker, partager et diffuser au plus grand nombre.
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